Symbole

 » Il y a deux sortes de symbole : les individuels et les collectifs. Une hostie est un symbole collectif : bien que ce ne soit qu’un peu de farine vaguement mêlé de sel et d’eau, c’est bien autre chose : mais ça n’aurait aucun sens si ça n’était dit que par une personne seule, ça n’aurait pas d’influence. Moi, je m’intéresse davantage aux symboles personnels, à quelque chose de déterminant dans une vie singulière et qui ne peut pas changer.  »
…Mon symbole, c’est Icare : l’homme qui prend des ailes et s’élève au-dessus de sa condition et de la terre, avec tous les risques que cela comporte. C’est l’homme qui veut devenir oiseau, changeant à la fois de règne, de condition, d’élément, et acquiert, par ses ailes, une nouvelle identité. Vous me direz que c’est un mythe, mais les mythes sont faits de symboles. Cela dit, sur un plan plus personnel, le symbole reste pour moi l’identité, pas la transformation. Ce sont donc deux approches qui se contredisent. Si l’on évolue, si l’on s’initie, on se transforme : on n’est donc plus reconnaissable intégralement – Platon cite les ailes comme symbole du mouvement, de la transformation. Alors que le symbole, à l’origine, est là pour m’aider à me reconnaître, hors du temps, archétypal, fixe. »
(Entretien pour Nouvelles clés)

Identité culturelle

…La recherche de l’identité culturelle – qui est aujourd’hui la grande préoccupation des minorités et des anciens peuples colonisés – n’est pas du tout une recherche archaïque. Il n’y a rien d’archaïque dans le fait de vouloir comprendre qui l’ on est. Il s’agit d’un problème qui, de tout temps, fut d’actualité. En revanche, je crois que la rencontre, la solidarité, l’alliance ou l’union des peuples, ou des nations, ou des états, ou des communautés, quelles qu’elles soient, ne peut se réaliser sans le respect de leurs particularités respectives et non par le nivellement. On ne peut augmenter sa puissance en renonçant à sa personnalité. Le fait de connaître ses racines, qu’il s’agisse d’un individu ou d’un groupe, ne veut pas dire que l’on recule, que l’on s’éloigne du présent, cela veut dire au contraire – pour rester dans la métaphore botanique – savoir quelles feuilles pousseront sur les branches.

Desmos, n° 27, 2007

Démocratie

Nous sommes saturés de démocratie et pour cette raison même, on est en train de la tuer, ou tout au moins de l’affaiblir. C’est une source la démocratie, elle doit naître des gens qui sont concernés, donc se renouveler à chaque génération, évoluer sans cesse selon les conditions sociales. On emploie ce mot un peu comme on emploie le mot communion quand on est dans une église, or c’est souvent très factice. Je pense qu’il faut réinventer une façon de vivre la politique, non pas de la faire mais de la vivre, parce que la politique appartient à tout le monde, elle n’appartient pas uniquement aux politiciens. Notre santé aussi nous appartient, les médecins sont là pour la contrôler mais elle dépend tout autant de nous. La démocratie c’est pareil, c’est une santé collective qui dépend de chacun de nous.

Modernité

La modernité appartient à un cycle, alors que la mode n’en n’est qu’un moment. La vision réelle de la vie, c’est la totalité du cycle. La modernité c’est le long terme, qui a commencé avec le siècle, c’est un ensemble. La mode, qu’elle soit littéraire ou vestimentaire ne dure parfois qu’une saison. Dans notre société rien ne nous distingue, au contraire, tout porte à nous confondre parce que c’est une société du paraître et de l’apparence, et il n’y a rien de tel que la mode pour confondre le superficiel et le profond.

Remise du prix Jacques Lacarrière 2018

Remise du Prix littéraire Jacques Lacarrière à l’Institut du Monde Arabe

Le 10 décembre 2018, le jury de cette première édition du Prix littéraire Jacques Lacarrière, présidé par Gil Jouanard, réuni dans la bibliothèque a récompensé l’auteur Jean-Luc Raharimanana pour son livre Revenir, paru aux éditions Rivages en mars 2018.

Accueilli par Jack Lang, président de l’IMA, Maati Kabbal, responsable des jeudis de l’IMA, Jalila Bouhalfaya, directrice de la bibliothèque, Vincent Guichard, directeur général de Bibracte, Benoît Boutilié, secrétaire général et Eloïse Vial, archéologue, responsable de l’action culturelle à Bibracte.

En ouverture, présentation du Prix par Gil Jouanard

Et la lecture d’un poème de Jacques Lacarrière dédié à Eloïse Vial La lumière éblouit l’invisible avec Sylvia Lipa-Lacarrière accompagnée au violon par Charles Mathieu

Si la plupart des écrivains confinent leur œuvre dans les limites d’un genre littéraire précis, parfois même dans celui d’une thématique, il n’en va pas de même de Jacques Lacarrière. C’est même tout le contraire : il échappe à la notion de genre comme à celle de catégorie et même de thème favori.
Après avoir été un lecteur passionnément éclectique d’ouvrages d’érudition, de traités spécialisés et de fictions romanesques, aussi bien que de poésie et d’œuvres dramatiques, il est devenu à son tour un prodigieux écrivain battant pavillon cosmopolite et spécialiste de tous les genres réunis, sautant de l’un à l’autre avec une maestria probablement sans égale dans notre littérature. Poète et conteur, penseur et espiègle, érudit et improvisateur. Tout comme il fut, dans sa vie, contemplatif et actif, marcheur de plein vent et méticuleux scrutateur de son intériorité et de sa mémoire. Lyrique, puis hardi explorateur ou scrupuleux spéléologue des labyrinthes de la nature humaine. Historien et entomologiste, marcheur de fond et flâneur de proximité. Quêteur de traces du sacré spirituel et terrestre, toutefois jamais affilié à une religion ou à une idéologie, libre penseur faisant son Dieu de toute la nature.
Il fut aussi l’ami simultané de Grecs et de Turcs, d’Israéliens et de Palestiniens, Carnute burgondisé, mais aussi gnostique et agnostique, moine du mont Athos et Bogomile post-mazdéen.
Physiquement, spirituellement et mentalement, il était ici, quand on le croyait là ; on pensait l’y avoir rejoint, voilà qu’il était encore ailleurs. Comme s’il avait cherché à débusquer la pierre philosophale ou à résoudre l’énigme de la quadrature du cercle.
Il aurait été utopique de chercher à dénicher l’oiseau rare, ou plutôt le cas d’espèce qui eût été à la fois insecte sous l’écorce et Jason argonaute, ascète et gourmand, aventurier et ermite, lyrique et humoriste, conteur et philosophe, naturel et sophistiqué.
Mais, par bonheur, nous avons reçu nombre de candidatures qui entraient avec bonheur dans une ou l’autre de ces tonalités réunies, d’ordinaire perçues comme incompatibles entre elles. Et, compte tenu de la grande qualité des ouvrages proposés, ce ne fut pas une mince affaire de désigner le premier des lauréats de ce prix Jacques Lacarrière, dont nos amis de Bibracte ont eu la généreuse et très opportune idée de prendre l’initiative.
C’est pourquoi je les remercie, en mon nom, en tant que président de Chemins faisant, au nom de Sylvia Lacarrière et au nom de tous les membres actifs de notre association, ou plutôt de notre confrérie des amis de l’espiègle « insecte protée », ainsi que je me suis permis de désigner Jacques.
Pour mieux vous faire savoir quelle fut notre bienheureuse difficulté à désigner un lauréat, parmi la riche diversité des candidatures, je vais à présent donner la parole à ceux des membres du jury qui ont accepté d’expliciter leur propre choix et de coopter le nom, et l’œuvre, de celui qui nous a paru, par la qualité de son livre et par l’adéquation avec un des aspects du génie polymorphe de Jacques fidèle à cet esprit dont je viens de définir la diversité et l’éclectisme si fertile, digne d’inaugurer ce prix, le premier d’une série que nous espérons longue..
Bravo enfin, et merci, à l’équipe du centre archéologique de Bibracte, à son directeur, Vincent Guichard et, en tout premier lieu, à Eloïse Vial, qui fut la coordonnatrice infatigable de cette si belle initiative.

Gil Jouanard

Turquie, Kurdistan. Dans les pas de Jacques Lacarrière

Vendredi 12 octobre 2018 à 18 h 30 à la bibliothèque de Saône-et-Loire (Charnay-les-Mâcon) «Turquie, Kurdistan. Dans les pas de Jacques Lacarrière », lecture musicale à trois voix par Elie Guillou, Mahmut Demir et Sylvia Lipa-Lacarrière pour approcher tour à tour la réalité crue de la guerre entre Kurdes et Turcs, la poésie mystique de Yunus Emere et les mélodies d’Anatolie.

Plus d’informations

Les Hérétiques

En cheminant avec Jacques Lacarrière de la terre d’Egypte à la terre cathare.
Avec une présentation de ses photos prises en Bosnie dans les années 1958-59… Une évocation des hérésies gnostiques, bogomiles, cathares à travers des lectures de textes des Gnostiques, de Marie d’Egypte, de Sourates et Chemin faisant par Sylvia Lipa-Lacarrière et ses amies.

Jeudi 2 février à partir de 18h30à La Galerie
4 rue Audran 75018
Paris
métro les Abbesses ou Blanche

« Sommes-nous vraiment au monde ? La vraie vie n’est-elle pas ailleurs ? » Dix-huit siècles avant Rimbaud, les Gnostiques ont posé ces questions radicales, sur les rivages et dans les ruelles d’Alexandrie, face aux idoles d’un monde en perdition…
… « Notre mémoire est courbe. Qu’on la remonte ou la prolonge à l’infini, elle nous permet de rattraper ces bribes de passé qui subsistent sûrement devant nous autant que derrière nous… »
… « Nous naissons, nous vivons, nous mourons au coeur d’un bourbier, d’un brasier moribond, au coeur des cendres – tièdes encore – d’une création qui alluma dans l’univers des millions d’incendies stellaires, qui sut former la nuit, la lumière, les étoiles mais qui ne sut donner à l’homme l’essence ni la grandeur qui, pensait-on lui revenaient.
…Les Gnostiques vivaient au coeur de cette noire irradiation, de cette lucidité en l’obscur de nos jours, de cette conscience d’une genèse, d’une promesse inaboutie. Remonter à l’erreur première, gravir en sens inverse le parcours de nos chutes, recommencer en somme notre naissance manquée, telle était la tâche essentielle. »

Livres pour un hiver

A l’orée du pays fertile, anthologie des
poèmes de Jacques Lacarrière, éditions SeghersCinabre
Soleil emprisonné dans les macles du soir, blessure d’où suinte le mercure, tu dis l’ultime cri du sang avant qu’il ne se fige, la grande paix des cicatrices et la convalescence de la terre

« La poésie est-elle faite pour durer à tout prix ou, au contraire, faire entrevoir, un court instant, l’éternité ? Est-elle une source ou un estuaire, un long compagnonnage ou un subit enchantement, autrement dit un coup de foudre ou un mariage d’amour ? Je me garderai bien de choisir pour préserver en moi, qu’elle soit mariage ou qu’elle soit foudre, le miracle de son mystère »

Méditerannées
Textes réunis dans « Bouquins », éditions PlonOù sommes-nous nés ?
… Et nous sommes nés aussi, un peu plus tard, en Grèce, sur la colline de la Pnyx, en face de l’Acropole, quand Périclès, le maître absolu d’Athènes, déclare aux Athéniens assemblés sur les gradins que l’homme doit devenir un citoyen conscient et responsable devant lui et devant les autres, et jamais plus un simple sujet obéissant aveuglement à des tyrans.
Dans la forêt des songes
Le dernier livre de Jacques Lacarrière, paru quelques jours après sa disparition et dont Gilles Lapouge disait : « … ce roman donné au moment de sa mort est déchirant. Jamais il n’avait inventé une fable aussi libre, aussi joyeuse que celle-ci. Il n’a jamais écrit un ouvrage aussi malicieux, aussi taquin, aussi fantastique, soumettant son érudition à la loi de la légèreté et de la drôlerie. … Un livre de grand savoir. Simplement, ce savoir est un « gai savoir ».
Nil, éditions.
A proximité de la ville de Troyes, en Champagne, il existe une forêt, une vraie forêt qui s’étale, frissonne et murmure autour de trois grands lacs et qui se nomme Forêt d’Orient.

C’est à l’orée de cette forêt qu’Angelot – chevalier sans cheval, paladin sans armure, pèlerin sans équipage – rencontre Thoustra, un perroquet ara, curieux de tout et légèrement dyslexique, avec lequel il va cheminer et croiser des êtres, figures, fantômes ou personnages surgis de différentes époques : un stylite sur sa colonne, une grue cendrée et bègue, le Grand Veneur d’une chasse fantastique, une ondine nymphomane, un androgyne transsexuel, une mère porteuse et vierge, et bien d’autres encore.
Cette fable souriante, avec son regard et son ton malicieux, réinvente les chemins des chevaliers d’antan pour les situer au coeur du monde d’aujourd’hui.

(réimpression de Chemins faisant, des Hommes ivres de Dieu, de l’Eté grec)

Sol Invictus

Solstice d’hiver romain

Site Archéologique d’Escolives-Sainte-Camille
Samedi 16 décembre à 18h30

Présentation Vincent Lacarrière
Lectures Sylvia Lipa-Lacarrière

9, rue Raymond Kapps
89290 Escolives-Sainte-Camille près d’Auxerre Tél. pour visites et réservations : 03 86 42 71 89

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