Dans la lumière antique

Première œuvre commune de Sylvia Lipa et Jacques Lacarrière, ce recueil propose une rencontre et une redécouverte des textes essentiels de l’Antiquité, choisis avant tout pour leur résonance avec notre époque. A travers eux, en Egypte, en Iran, en Mésopotamie, en Grèce, à Rome et jusque dans le domaine peu connu du monde gréco-bouddhique, le lecteur pourra effectuer un véritable pèlerinage aux sources de la pensée et de la poésie antiques. Car même s’ils parlent avant tout de leur époque, c’est aussi à nous que s’adressent ces textes, dans la profondeur de leurs mots et la transparence du temps.  » Entre l’instant qui passe et l’Au-delà qui s’éternise « , écrit Jacques Lacarrière,  » s’impose le temps présent, vivant, des hommes. Le seul qui vaille d’être recensé. Avant lui, après lui, il n’y a que des ombres. En lui seul et sa durée fragile, résident la saveur du temps et la lumière des hommes « .

Entre l’instant qui passe et l’Au-delà qui s’éternise, s’écoule le temps présent, vivant des hommes. Le seul qui vaille d’être recensé. Avant lui, après lui, il n’y a que des ombres. En lui seul, et sa durée fragile, résident la saveur du temps et la lumière des hommes.J.L.

« Les mythes n’ont jamais été pour moi des fables ou des légendes destinées aux enfants. Beaucoup d’entre eux, notamment ce qu’on appelle les mythes cosmogoniques, qui racontent la naissance du monde et son évolution, sont devenus ou redevenus d’une vérité et d’une actualité brûlantes, comme on dit. Par ailleurs, ces mythes, jadis, étaient des récits fondateurs, qui ancraient chaque cité, communauté, institution, dans la réalité quotidienne. Ils expliquaient l’origine des choses mais dictaient aussi très souvent les rites et les comportements religieux nécessaires. Ils reliaient l’homme aux dieux en permanence. Tout ceci d’ailleurs n’a pas disparu avec le christianisme (songez, par exemple, à la puissance toujours sensible des mythes de l’Enfer et du Paradis dans cette religion aujourd’hui). Les mythes, plus encore que l’histoire, constituent à travers les âges une chaîne, un phyllumplus résistants que ceux de la religion ou des mentalités. Nous n’avons plus grand chose en commun, par exemple, avec un Grec du Ve siècle avant J.-C. si ce n’est certains mythes qui nous habitent encore. Ce qui m’intéresse dans la pensée antique, c’est sa permanence, en tout cas ce qu’elle nous a transmis. Je sais par expérience qu’il y a des écrivains antiques qui me sont aussi proches que des écrivains d’aujourd’hui. Non pas, comme on le dit ou on le croit communément, parce que « rien n’a changé sous le soleil » – ce qui est un adage absurde et tout à fait faux –, mais parce qu’en chaque époque et chaque civilisation, il s’est trouvé, par la littérature, la musique, l’art ou la philosophie, des gens qui ont su à la fois exprimer leur temps et le dépasser. J’ai d’ailleurs, avec Sylvia ma femme, publié une anthologie de ces réflexions universelles, non parce qu’elles n’ont pas d’âge, mais au contraire parce qu’elles en ont un : Égypte ancienne, Mésopotamie, Iran ancien, Grèce, Rome ont donné naissance à des réflexions, des questions, des lamentations ou des cris qui nous montrent de façon troublante et souvent bouleversante qu’on a bien réfléchi avant nous à toutes les questions essentielles. Être moderne, en ce qui concerne l’étude et la traduction des auteurs anciens, ce n’est pas les rapprocher à tout prix de nous par quelque détournement de pensée, c’est montrer au contraire la continuité des joies et des larmes et l’effort permanent de l’homme pour éclairer sa présence au monde. Ce qui revient aussi, si l’on préfère cette formulation, à chercher, malgré trois mille ans d’écart, les compagnons qui eussent été les nôtres s’ils avaient vécu… trois mille ans plus tard. »
J.L.
Extrait d’une interview de Gaële de La Brosse (Chemins de traverse n°8)

Editions Kiron, Philippe Lebaud, ISBN 978-2866453336
Editions Oxus, 2004, ISBN 978-2350160009